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Philosophie de l'éducation, aide à l'apprentissage

Présentation

Mes trois auteurs de référence – Rousseau, Kant et Fichte – sont aussi trois auteurs majeurs de la philosophie de l’éducation. A des titres différents, l’éducation tient une place essentielle dans leur système : recherche d’une radicalité qui est tout à la fois critère de jugement et mesure des possibles pour Rousseau, formation du caractère pour Kant, ou construction de chacun comme membre d’une communauté rationnelle, par l’interaction avec les autres membres de cette même communauté pour Fichte. Il s’agit à chaque fois de se rapporter à une idéalité : nature humaine ou existence rationnelle d’un monde intelligible, et l’affirmation de la liberté, posée par nos trois auteurs dans ce rapport à l’idéalité, a d’abord pour enjeu de s’opposer au donné. Pour autant, le rapport à cette idéalité ne néglige pas notre existence première : il s’agit toujours de rapporter l’idéal au réel, à partir de, et pour, ce monde-ci, qu’il s’agit donc de transformer. Cette thématique de la transformation explique la relation privilégiée qu’entretient, au-delà de nos trois auteurs, tout le XVIIIe siècle avec la question de l’éducation. En matière d’éducation la question n’est plus immédiatement celle de la transformation du monde ou de la société, mais de l’homme, et c’est au XVIIIe siècle que naît cette pensée paradoxale de l’homme comme étant essentiellement transformable. Que l’on pense par exemple à l’étrange définition rousseauiste de la perfectibilité, qui privilégie essentiellement la possibilité du changement lui-même, comme plasticité indéfinie, en reléguant au second plan les perfections visées. Cette capacité à se transformer devient l’essentiellement humain, la nature humaine n’étant plus alors simplement définie comme rationnelle, mais d’abord comme liberté[1], jusqu’à ce que la raison elle-même soit ensuite, avec la raison pratique kantienne, définie comme liberté. Ces thématiques sont développées dans l’ouvrage de 1992, Éducation et liberté, l’article consacré à l’éducation rousseauiste (Philosophie et pédagogie dans Emile), et la conférence plus récente sur « L´Émile de J.J. Rousseau : philosophie de l´éducation et transformation sociale ». Nous renvoyons à l’ensemble de ces textes ci-dessous.

Cette rubrique consacrée à la philosophie de l’éducation et aux « aide à l’apprentissage » a deux parties bien distinctes mais qui peuvent s’étayer l’une l’autre. Mon recrutement comme Maître de conférences à Paris-1 a tranché en faveur de la philosophie et interrompu, en 1993, une "Recherche / action" en établissements spécialisés qui venait, dans le cadre d’un Doctorat en Sciences de l’éducation, compléter des écrits sur l'attitude réflexive et la prise de conscience de l'action propre, comme pédagogie d’aide structurant l’activité des élèves en difficulté. La dimension surtout cognitive de ces recherches se fondait sur le tout dernier Piaget (L’équilibration des structures cognitives, l’abstraction réfléchissante…) étudiant la dynamique du développement cognitif. Je pars des schémas de développement du tout dernier Piaget, mais je m’en sépare pour tirer des conclusions utiles, en matière d’aide aux élèves en difficulté. A l’encontre d’une conception du développement fondée sur ce que l’apprenant peut observer, conception admise par le dernier Piaget et induisant des pratiques pédagogiques, ma thèse soulignait le rôle de la prise de conscience de l’action propre et de l’attitude réflexive comme moteur de l’apprentissage. Ce qui était dénoncé comme erreur chez l’élève en difficulté apparaissait alors comme recherche ou tentative de résolution, et engageait d’autres modalités d’action pédagogique, celles là mêmes qui faisaient l’objet du travail de doctorat sur la structuration de l’apprentissage, visant une prise de conscience de l’action propre, et guidé par l’utilisation des référentiels de formation. Ces aspects sont développés dans les articles de la Revue du Cerfop et les textes de recherche auxquels nous renvoyons ci-dessous.

L’intérêt porté à l’attitude réflexive permet, à partir de recherches pédagogiques, de rapporter une dimension cognitive et théorique à une dimension morale et politique, recouvrant une visée éducative d’autonomie. On retrouve alors le sens large que revêt, dans la philosophie contemporaine[2], la réflexivité comme apprentissage discursif des règles collectives. En deçà des dimensions actuelles de la dynamique des groupes, les pédagogies de l’éveil et de l’activité s’enracinent dans des conceptions éducatives (Rousseau) qui naissent avec l’ouverture de l’espace public dans l’État moderne (de Kant à Habermas). J’ai explicité[3] comment la construction de l’espace public peut être aperçue comme rapport à soi. Dès l’époque des Lumières, l’espace public apparaît comme lieu d’un apprentissage, voire d’une conquête progressive de l’autonomie, sur le modèle de la relation éducative.

La construction du rapport à soi, aperçue au travers de la médiation pédagogique, permet d’articuler trois foyers de mon travail : une dimension spécifique des pédagogies d’aide aux élèves en difficulté, une histoire des théories de l’éducation (de Locke au Philantropin de Basedow ou au Neuhof de Pestalozzi, deux applications qui constituent le futur proche de mes recherches) qui rapporte relation pédagogique à la construction sociale et politique de l’espace public, des interrogations plus contemporaines enfin, sur les modalités et les fins de cette convocation des individus dans l’apprentissage. Ici les sciences de l’éducation rejoignent les derniers développements de mes travaux en philosophie, abordant des auteurs plus contemporains, Foucault ou Althusser, pour étudier le rapport entre obéissance et identité personnelle.

Ouvrage.

Éducation et liberté (Kant et Fichte), Paris, Presses Universitaires de France, 1992 (coll. Philosophies). Ouvrage traduit au Brésil et en Grèce.

Revues.

1990 : « Philosophie et pédagogie dans Emile », Les Cahiers philosophiques, 1990, N°44, (30 p.)

Articles de psychopédagogie dans La Revue du C.E.R.F.O.P. (Centre de Cronstadt)

1989 :  « Le P.E.I., une nouvelle perspective pédagogique pour les formations adaptées ? »

1990 : « Une dimension spécifique des pédagogies adaptées ».

1991 : « La validation des acquis et l'acte pédagogique ».

1992 : « Adaptation, appropriation, aide pédagogique ».

1992 : « Métacognition, aide à l'apprentissage et remédiation ».

2007 : « L´Émile de J.J. Rousseau : philosophie de l´éducation et transformation sociale ». Le Spectateur Européen, Vol. 9, Montpellier, Publications de l’Université de Montpellier III, 2007.

Recherches psychopédagogiques

Stratégies d'apprentissage dans l'accès à l'opératoire formel. Étude d'un cas. (23 pages).

La structuration des activités d'apprentissage en pédagogie d'aide (77 p.)



[1]. Dès Rousseau, cf. Jean-Jacques Rousseau, l’individu et la république, ch. un.

[2]. P.ex. J. Habermas, Moralbewusstsein und Kommunikatives Handeln, 1983 ; trad. fr. Paris, Cerf, 1986, Morale et communication, ch. 1 p. 30.

[3]. P.ex. dans ma conférence de mai 2004, Du législateur au public éclairé : l’histoire du progrès politique chez Rousseau, Kant et Fichte, (publié In J.C. Bourdin (dir.) Les Lumières et l’idéalisme allemand, actes du colloque de Poitiers, C.R.H.I.A., L’Harmattan, 2007) ou dans la conclusion de Philosophie et philosophie des normes chez Kant, conférence prononcée lors du colloque « Philosophie des normes », le 7 et 8 décembre 2006 à l’Université Paul Valery (publié in Multitudes 2008, N°34. Avec une présentation du colloque que j’ai organisé avec S. Ansaldi : « La philosophie des      normes »).